Effondrement de la biodiversité, pandémies, changement climatique, les sociétés humaines sont dépendantes du vivant (écosystèmes, milieux, espèces, etc.) au sein duquel elles vivent. Le rapport au vivant autre qu’humain des sociétés modernes, occidentales ou occidentalisées, montre ses limites tant la séparation est marquée : d’un côté l’homme, de l’autre la nature. Toutes les analyses scientifiques mondiales convergent sur une urgence écologique. Habiter différemment la Terre devient un impératif pour l’avenir.
On va donc parler de « viabilité » des systèmes humains ou écologiques pour signifier leur existence biologique dans toutes leurs dimensions dans un temps long, de façon durable.
La viabilité est la capacité à vivre, mais plus encore, c’est l’aptitude d’exister de façon durable, de s’épanouir, d’évoluer dans le bien-être et le bonheur. Exister, consiste à entrer en relations avec le vivant, entre humains, certes, mais aussi entre humains et non-humains. Cette mise en relation génère des contraintes de solidarités, de dépendance et d’interdépendance d’ordre vital par le besoin de l’autre.
Ainsi, il y a une vraie interdépendance des humains au vivant qui résulte des interactions entre humains et non-humains (homme/nature). Cette interdépendance définit une viabilité conjointe entre ces deux sphères, faisant que la viabilité des uns dépend de la viabilité des autres. L’humain ne peut vivre hors de l’oxygène, de la terre, de l’eau, etc., et des ressources provenant des systèmes écologiques, des milieux, des animaux, des plantes et des paysages qui participent à sa vie. En même temps, les écosystèmes ne peuvent subir une pression trop forte de la part des sociétés humaines, en raison de leur limite biologique, de régénération, de développement et de résilience.
Au sein du vivant, humains et non-humains, les liens de viabilité mutuelle prennent le nom de « coviabilité socio-écologique ». La coviabilité vient du fait que la viabilité d’une entité (un être vivant, un écosystème, une société, etc.) dépend de la viabilité d’une autre entité. Toute entité n’existe que grâce à ses relations avec son « environnement », et les autres entités.
Chaque société et individu manifeste une manière d’être et de s’insérer dans le monde. Il en découle une posture vis-à-vis de la nature : soit de la séparation (la nature n’est que l’environnement des humains), soit de la continuité (les humains font partie de la nature). C’est cette seconde posture qui définit la coviabilité socio-écologique comme nouveau paradigme mis à jour par le monde scientifique pour permettre de refonder les rapports à la biosphère et aux ressources naturelles.
Dans une ère où l’humanité bouleverse profondément le système Terre par ses activités, l’enjeu est de les liens entre les sociétés humaines et le monde vivant pour prévenir, s’adapter ou « lutter » contre le changement climatique, l’érosion de la biodiversité, la désertification, la destruction des écosystèmes, les pollutions anthropiques, etc. L’enjeu de cette reconnexion est un défi à la fois culturel, économique, éthique, politique, technologique, et scientifique.
Pour résumer, dans l’ère d’une mondialisation croissante et de la prise de conscience de la finitude des ressources de la planète Terre, l’urgence écologique traduit une interdépendance humains/non-humains d’où émerge ce lien de viabilité : l’homme ne dépend pas que de lui pour survivre, se développer et se perpétuer, mais de sa relation à l’ensemble du vivant constitutif de la biosphère. Les populations autochtones le démontrent dans leurs propres perceptions.